09 mars 2008

Des 52 minutes sur TF1

Je poursuis ma recherche du renouveau des séries françaises... Ce renouveau passe par le format 52', plus dynamique que l'antique 90'. Le but du jeu est de trouver un concept de série attrayant ET novateur ET en prime-time ET grand public ET sur TF1. Sacré défi!

Mais il y a un hic: TF1 n'aime pas programmer des 52 minutes, parce que ça bouscule sa grille des programmes. C'est difficile à imaginer qu'une raison aussi simple mette en péril le renouveau de la fiction télévisuelle française, mais si nous nous mettons quelques instants dans les bottes du programmateur, tout va s'éclaircir.

La grille des programmes (leur agencement horaire) est la principale marque d'identification d'une chaîne de télé: une grille des programmes stable, c'est des taux d'audience stable, et donc des entrées financières stables. C'est ce que TF1 recherche.

Les 52' désorganisent la programmation de soirée. Et il est prouvé que la programmation de deux 52' minutes l'un après l'autre fait perdre à la chaîne de télévision une partie de son public (qui part pendant la pause publicitaire).

Ca, c'est le discours officiel. En réalité, TF1 diffuse de nombreux "blocs" de 52' minutes, mais à la nuance... que ce sont des séries américaines! Là, pas de problème de programmation: ça coûte rien et ça rapporte gros.

Mais arrêtons ici les gémissements. Nous partons plus faibles, il va falloir ruser.

Première étape du plan: "know your enemy". Enfin, "know your partner", mais parfois on aurait tendance à confondre les deux... La nouveauté, c'est que Takis Candilis ne s'occupe plus des séries télé sur TF1. Il a été remplacé par Laurent Storch, ce qui laisse le faible espoir d'un changement de politique (mon cul c'est du poulet, mais je suis optimiste). Ceci dit, un survol de la carrière du gusse nous laisse entrevoir un bon soldat de l'audience, peu soucieux de la vision des auteurs (les coupes claires dans un documentaire sur Hitler, c'est lui).

Deuxième étape: calibrer le produit. Storch n'aime pas les séries "feuilletonnantes" (il s'étonne du succès de Grey's Anatomy), il a remarqué que les succès du moment aux USA visent les jeunes (ça alors!), intègrent des éléments de SF/fantistique au quotidien (Heroes), ont des personnages attachants (la découverte!) et, grosso modo, sont artistiquement convaincantes. Pour notre série française de 52' parfaite, nous pouvons donc aller plus loin que je ne l'imaginais: la SF et l'action, c'est ok! Lancez-vous! Mais attention, pas de "space opera". Il faut être proche des préoccupation des gens, mais en "bigger than life". Sans oublier le budget français, c'est à dire où le seul effet spécial, c'est le scénario.

Reste à espérer que Storch, en bon connaisseur des séries US, se rende compte que la copie carbone version française ne "marchait" pas (RIS fait bien de l'audience, mais fait-elle des heureux?). J'veux dire, réfléchissons trente secondes: si les gens regardent RIS (parce qu'il n'y a rien d'autre) sans plaisir, comment les publicités qui y sont intercalées peuvent-elles atteindre des cerveaux disponibles? Au contraire, la série déteindra négativement sur la publicité, les cerveaux seront plein d'ondes négatives, et ça c'est mauvais pour Procter & Gamble. Malheureusement, le succès mondial des adaptations de "Yo Soy Betty la Fea" (Le Destin de Lisa, etc...) lui font probablement penser le contraire. Qu'une adaptation française d'un truc étranger ferait un carton? Comme on dit dans ces cas-là: "il va se lasser".

Troisième étape du plan: viser l'exportation. Une série française coûte cher et rapporte peu à son diffuseur. L'exportation peut donc renflouer les caisses. Pour une bonne exportation, pas trop de références culturelles, des épisodes en suffisance - et rapidement (on n'exporte pas 12 épisodes...), et des thèmes universels. Le sexe, l'amour. Les problèmes de cœur, aussi. J'ai déjà dit, les romances? La série française la plus exportée c'est "Sous le soleil". Vous voyez le tableau. L'avantage des 52' c'est qu'ils s'exportent facilement. Les 90' ne trouvent leur place qu'en France.

Quatrième étape: ajouter une pincée de créativité. Je ne perds pas de vue notre objectif initial: créer une série agréable malgré toutes les contraintes. On n'est pas là pour refaire Julie Lescaut. Soyons un peu fou.

Si on regarde les video des teasers de toutes les séries "made in TF1", sur www.tf1.fr, on remarque de grandes similarités entre elles. Le genre policier, presque systématiquement. Père et maire fait exception. Même Soeur Thérèse.com, c'est du policier. Le héros est toujours centré sur son métier. A croire que la carrière professionnelle est le centre de la vie. La scène est toujours la même: un crime, les flics (avec l'obligatoire brassard orange) se pointent, font des commentaires plats sur les circonstances et/ou les preuves, et ensuite il ne leur reste plus qu'à remonter la piste... Mouarf. On va simplement s'interdire de faire appel aux flics. Juste pour le plaisir.

Voilà. On a rassemblé tous les éléments. Reste plus qu'à constituer le puzzle.

Notre série de 52' "parfaite", elle n'existe pas. Ouh, la fin décevante. Soutenir le suspense si longtemps sans donner une solution toute faite, c'est criminel. Je sais. Mais avouez que j'ai donné quelques éléments de réponse. On sait déjà que la série ne mettra pas en scène un flic (ou assimilé: procureur, détective, avocat...), qu'elle aura un "twist" SF/fantastique soft (genre, l'homme cyborg, ou le gars qui voient dans le futur, qui lit dans les esprits), mais qu'elle s'intéressera aussi aux préoccupation des jeunes: sexe, amour, romance, on connaît la chanson.

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